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SIHAM BOUHLAL

 

Je suis l’africaine


Je suis l’africaine
Noire ébène
A ma blanche peau
Ne prêtez d’importance

Je suis la fille des sables
Mon âme est tannée
Mon cœur bat de sang brun
                                            Si noir

Ne me parlez plus de Méditerranée

Je suis née africaine
Marcher nu-pieds
Me sied mieux

Mon regard pleure l’olive
Brune
          Noire

Je
          Suis 
                   Fille
                           Des
                                   Sept
                                             Collines

Tuez-moi encore
Je reviendrai demain
Noire comme à mon premier jour

Ne prêtez guère d’attention
A ma langue pure
D’arabe, à mon français
Châtié ou même
A mon sang d’amazighe

Je m’alourdis de chaînes
Et
                       Marche
                                                 Vers
                                                                    Mon
                                                                                       Afrique

Expier les crimes de ma race

Je me tiens debout
Ensanglantée et ouvre mes bras
A mon ami africain

Je maudis les négriers
De toutes les histoires
Anciennes ou si proches

Sur le sable je m’allonge
            Me livre à la marée noire
Vigoureuse

Ils m’ont spoliée de toi
Mon Afrique
Mais je te reviens
Gorgée de feu

Je te reviens
Et mon poème
Est d’écriture royale

Bamoun est mon poème
Cousin du Tifinagh

Saint Augustin sourit

Njoya est assis sur son trône
Il bénit la sueur de mes mots
Il n’est d’Orient ni d’Occident
Mais des deux à la fois

Il trace la Bible le Coran
Sur un unique parchemin
Et les signes anciens

Ouvre-moi tes bras
Njoya 
Ouvre-moi
Et je dormirai

            Sur 
                    Ton 
                             Cœur


Moi la fille aux yeux de jais  Moi l’africaine  Que l’on assassine  Qui renais toujours

Ma géographie
N’est pas simple
Mais je ne m’y perds pas

Je sais ce que mes courbes recèlent
Mon dos plantureux
Mes reins
Et ce que ma main
Supportent

Mon viatique est si mince
Mais qu’importe ?

La Méditerranée me noie
Dans ce que je ne comprends pas

Je nage et étouffe
             D’excédent
                                    D’iode
M’aveugle de blancheur

Laissez-moi à mon Afrique
Peut-être qu’Elle
Sait la voie de mon bonheur

Mon sang est bleu  Touareg  Il coule dans les rigoles  Improvisées du désert

Mon tatouage  Est invisible

Je tire
Ma chevelure
Sur le sable

Je trace et retrace
Les traits
De mon destin

Siham Bouhlal